Premières lignes #1 On ne paie pas ! On ne paie pas ! Dario Fo, L’Arche éditeur


 Chaque dimanche les premières lignes d’un livre sont proposées à la lecture d’après l’idée originelle de ma lecturothèque qui publie sur son billet consacré la liste des blogs qui y participent.

dario-fo-larhe

 

Un petite bafouille sur un géant, au sens propre comme figuré, Dario Fo, qui nous a quitté il y a quelques semaines sur la pointe des pieds laissant un vide béant derrière lui, arrive bientôt. J’ai choisi de débuter ce rendez-vous par une pièce écrite en 1974 par Dario Fo, Sotto paga ! Non si Paga !, et que Franca Rame et Dario Fo ont remanié en 2008 tant elle restait d’actualité et tant, comme il nous le signale dans le prologue de 2008 : » certaines situations qui à la création pouvaient sembler surréelles, le fruit d’une hyperbole extravagante, s’avèrent aujourd’hui tout à fait normales « . La pièce commence par une chanson satirique liminaire puis débute réellement. 

CHANSON : "QUI A DIT ÇA ?"
 Ecoutez, peuple de marins de poètes et de saints,
 D'émigrés, de travailleurs fatigués, de riches citoyens,
 Vite, en choeur, chantez, et dans la bonne tonalité !
 Pourquoi ? Tiens donc ! Qui a dit ça ? Qui peut nous
 forcer à être contents de chanter ?
 Stop ! Silence ! Attention ! Tout le monde ne pourra pas chanter !
 Au premier rang chanteront les ministres et les sous-secrétaires,
 En contre-chant les archevêques et les généraux,
 Dans les aigus, les banquiers, les cols d'hermine des tribunaux
 Et avec une belle ardeur
 Chante, chante l'enquêteur...
 Les ménagères, les employés, toute la classe moyenne ou
 basse,
 Ouvriers, intérimaires... ne devront pas chanter du tout,
 Les précaires, les chômeurs devront se contenter de faire
 tourou
 Toutourou toutou !
 Comme la contrebasse !
 Pourquoi ? Tiens donc ! Qui a dit ça ? Qui peut nous
 forcer à rester sans chanter ?
 Pourquoi? Tiens donc ! Qui a dit ça ? Qui peut nous
 forcer à rester sans chanter ?

Vous ! Taisez-vous ! Attention ! Un, deux ... Les autres,
 chantez !
 Nous sommes tous sur le même bateau qui prend l'eau !
 Et pendant que ceux-là s'amusent à chanter, vous, vous
 ramerez !
 Courbez l'échine, ramez, ramez,
 C'est nous qui donnons le tempo...
 Que celui qui ne suit pas se prépare à émigrer !

Qui a dit que c'était triste de devoir faire ses valises ?

Émigrer pour survivre, errer de la Belgique à la Suisse...
 Il suffit que les valises débordent de billets !
 Il suffit de peu, de très peu pour être satisfaits !

Pourquoi ? Tiens donc ! Qui a dit ça ? Qui peut nous
 forcer à nous taire et à ramer ?
 Pourquoi ? Tiens donc ! Qui a dit ça ? Qui peut nous
 forcer à nous taire et à ramer ?

Paroles de Dario FO. Musique de Fiorenzo Carpi.
PERSONNAGES 

ANTONIA, demandeuse d'emploi
GIOVANNI, ouvrier, mari d'Antonia
MARGHERITA, employée à statut précaire
LE POLICIER
LE GENDARME
LE CROQUE-MORT
LE VIEUX, père de Giovanni
LE DEUXIÈME CROQUE-MORT
QUELQUES GENDARMES, POLICIERS ET DEMENAGEURS

Un modeste appartement d'ouvriers. Sur le côté gauche de la scène, 
un vaisselier aux portes vitrées, un lit (pliant). Du côté droit, 
un portemanteau, une armoire. Au centre, une table, trois chaises. 
Au fond, un autre vaisselier, un réfrigérateur, une gazinière, et un 
peu plus loin son chalumeau à souder avec deux bouteilles de gaz. 
Pour les situations qui se passent à l'extérieur, une toile de fond 
représentant Le Quatrième État, de Pellizza Volpedo.

L'action qui va suivre se déroule dans la rue. 

Lorsque la lumière monte Antonia (la maîtresse de maison) 
entre en scène, suivie de Margherita (une amie plus jeune). 
Elles sont dans la rue, chargées de nombreux sacs en plastique 
remplis de marchandises. 

ANTONIA.  C'est une chance que je t'aie rencontrée. Je ne sais vraiment pas
comment j'aurais fait pour transporter tous ces sacs.
MARGHERITA. Est-ce que je peux savoir où tu as trouvé l'argent 
pour acheter tout ça ?
ANTONIA. Je l'ai gagné, je t'ai dit, avec les bons d'achat... et puis, 
dans un paquet de lessive... j'ai trouvé une pièce d'or... avec dessus 
la tête du pape.... furieux.... que cette année, il a perdu 
trente-cinq millions d'euros sur la dotation de l'Eglise.
 MARGHERITA. La foi se perd ! Ah finalement les riches 
aussi se mettent à pleurer ! Mais toi, arrête de raconter 
des salades... Qu'est-ce que c'est, cette histoire de pièce d'or !
ANTONIA. Tu ne me crois pas ?
MARGHERITA. Non.
ANTONIA. Alors je vais t'en raconter une autre... 
donc il y avait un ... (Margherita s'en va vexée.) Où vas-tu ?
MARGHERITA. Au revoir !
ANTONIA. Quelle susceptibilité ! Viens ici... Assieds-toi... 
je vais te dire la vérité.

On ne paie pas ! On ne paie pas ! Dario Fo, supervisé par Franca Rame
Traduction- adaptation française de Toni Cecchinato et Nicole Colchat
L'Arche Éditeur

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