
Samedi soir dernier, une salle bondée assistait religieusement à la dernière mise en scène de Robert Icke, seconde représentation ce soir-là, d’une longue série de la très attendue Mary Stuart de Friedrich Schiller à l’Almeida Theatre à Londres.
Robert Icke est connu ici pour son adaptation du roman 1984, ou encore ses adaptations/mises en scène, la controversée L’Orestie, Oncle Vania ou encore The Red Barn (adapté du roman de G. Simenon, La Main).
Le drame romantique et tragique de Schiller, Marie Stuart, révèle l’une des moments forts de l’histoire britannique : la lutte pour la couronne entre deux reines ; l’une au pouvoir et l’autre jetée en prison. Reine d’Ecosse, catholique, Marie Stuart, soupçonnée d’être à l’origine de l’assassinat de son mari, Lord Darnley est emprisonnée. La reine d’Angleterre, Elisabeth Ier, protestante, la voit comme une menace. En effet, pour les catholiques, Marie Stuart est l’héritière légitime du trône.
Mortimer, fils de son dépositaire, disposé à l’aider tente de la faire fuir mais échoue. Dans le même temps, tandis qu’elle mandate l’oncle de Mortimer pour obtenir de l’aide de son ancien amant Lord Leicester, devenu proche de la reine, elle reçoit, après maintes demandes, la visite d’Elisabeth Ier qui se termine en une violente dispute ce qui scelle en quelque sorte, son destin funeste… Tous les ressorts d’une pièce tragique abondent dans cette œuvre : personnages nobles, accédant au statut de héros, malentendu, écartèlement tragique. Les intrigues subsidiaires s’emboîtent ainsi dans le grand destin historique de Marie Stuart.
Dans cette version, la pièce prend place sur une scène victorienne, au plateau dénudé, dont seules figurent des planches de bois et des bancs en verre et dont les murs de briques servent de coulisses.
Le soir où j’ai assisté à l’adaptation « plus classique des pièces de Schiller », les coutures de la mise en scène restaient encore apparentes : les deux comédiennes stars, Juliet Stevenson (Mary Stuart) et Lia Williams (Elisabeth Ier), enchaînaient bien trop rapidement certaines répliques à mon goût, le jeu des comédiens était inégal.
Si l’on assiste réellement à la naissance d’Elisabeth Ier, la montée tragique ne m’a pas entièrement convaincu : l’effet de surprise avec l’abaissement de l’un des murs de scène révélant son blason et l’habillage sur scène en costume d’époque d’Elisabeth Ier alors que les comédiens portaient tout au long de la pièce des costumes actuels (blaser, pantalon). De même l’utilisation de la video m’a paru inutile : elle sert simplement à montrer la ratification des traités (mise à mort de Mary Stuart) mais en aucun cas ne fait ni avancer l’action, ni n’apporte un aspect esthétique singulier, si ce n’est une référence au XVIe siècle.
Pourtant l’ensemble fonctionne même en entremêlant époque actuelle et XVIe siècle, comique et tragique, et bien que la salle ait sans doute été plus réceptive au comique, le duel entre les deux reines engendre de magnifiques moments de grâce au cours : les deux comédiennes allongées au sol se faisant face en un mélange de tension tragique, de duel et de tendresse à la fois. Le jeu de Lia Williams vaut également le détour. La force de cette mise en scène réside dans la subtilité de la relation qu’entretiennent Elisabeth Ier et Marie Stuart et que Robert Icke ici réussit à mettre à jour.
Sans doute ces moments de flottement sont-ils dû à une mise en scène peu risquée qui aurait pu être poussée bien plus loin mais aussi à la deuxième représentation de ce spectacle.
à voir actuellement à l’Almeida theatre à Londres : https://almeida.co.uk/whats-on/mary-stuart/2-dec-2016-21-jan-2017
Robert Icke : http://roberticke.com/
Marie Stuart, Schiller, L’Arche
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